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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 14:08

Une petite nouvelle trés particulière pour vos vacances ?

S'il n'y avait cette chute, on pourrait la dire comme un conte provençal ou un portrait, non ?

Faites un petit jeu cherchez le nom de l'auteur vous-même mais remarquez qu'au passage, il rend hommage à deux de ses amies...

Et Alice Hugo a dit que c'était la meilleure nouvelle qu'il a écrite...

 

 

La fille du Nord

 

 

Quand je l'ai vue avec cette grâce enchanteresse s'asseoir sur un de ces voyeurs qui supportent le séant de tant de gens, quelque chose a changé. J'ai tout oublié... Et je me suis cru capable de lui offrir pour son déjeuner un croissant de lune !

 

Dans ses yeux, sous le bleu d'un ciel d'hiver, flottait l’iceberg qui a coulé le Titanic ! C'était le genre à vous fusiller d'un regard, comme à vous enrober d'une douceur chaude à l'inverse de son climat natal. Ses cheveux blonds cascadaient en épis de blés provençaux chantant sous le soleil du midi. Les ondulations arrondissant la silhouette d'une fée relevaient en proue du navire le visage d'un ange. Elle m'avait rappelé une autre fille blonde que j'avais connue à la même époque : la fille à la guitare©.

Cette personnalité se détachait de celle des autres femmes, dominante à la hauteur du phare du Risban. Son baiser léger nourrissait avec la saveur du Potjevlesch allié à une sensation qui vous renverse comme un débarquement. Emporté sur un tapis volant vers la plage de Malo les bains sans quitter mon champ de lavande bercé par les stridulations de mes cigales, j’ai pénétré dans le monde des rêves quand j'ai effleuré sa main.

 

Aurais-je pu l’oublier ? Si oui, pourquoi ce stylo s'est-il acharné à déflorer de l'érection de sa plume ces vierges blanches que je couchais, devant lui, pour brouillonner cette armée de lignes, avant de les frapper du sceau d'une arobase. J'ai enfilé d'autres perles sur le tapis de l'imprimante. Les mots libérés de leur couloir secret, expirés de l'âme vagabonde, déferlent en farandole sur le papier étonné pour tracer maladroitement un portrait du passé que nul pinceau ne saurait peindre. Et les termes marchent sur la traîne de sa silhouette blanche de mariée sans mariage sur un bord de mer livré aux mouettes moirant un paysage digne d’un tableau de Sonia Kitaëff.

 

Belle, non, c'est au-delà des mots ; une communion du corps et de l'âme, comme dans une chanson d'Enrico, avec dans le cœur le soleil qu'elle n'a pas dehors, et, dans les regards, des étincelles d'un feu de cheminée des veillées de Provence avec un conteur qui parlerait d'elle la comparant à l'Eve éternelle.

Après son passage, plus rien n'est pareil ; la terre ne tourne plus de la même façon et l'horizon bascule plus loin pour ouvrir des espaces ignorés inconnus. Derrière elle, les gabians se transforment en cigognes et l'herbe qui se couche sous ses pas pond des marguerites. La mer d'huile l'accueille pour son bain du matin, plane comme un simple baquet. Nue en plein hiver, vestale ne craignant pas la morsure du Mistral, ni le regard des pins parasols courbés vers elle pour la saluer qui déposent leurs pignes volages à ses pieds en offrande à la supériorité féminine.

 

L'empreinte de ses orteils se dessinait dans le sable rare aux abords de son entrée dans l'eau. La mer, baignoire de cette sirène, retenait ses grandes vagues pour la bercer sur une symphonie interprétée par le ressac. Son corps porté par l'onde pure vibrait dans l'eau que les autres trouvaient froide pour régénérer son énergie étonnante. Elle valsait sur les rochers comme les étoiles de la grande ourse dansent sur le tapis céleste.

Son sourire ouvrait des pétales de rose sous son nez qui frémissait en s’enivrant du parfum des lavandins. Ceux-ci rougissaient, honteux de ne point la parer de cette véritable saveur de la lavande des hauteurs, au-delà de mille mètres, celle des huiles essentielles qui auraient pu couler en conservatrices de ce corps de princesse. Ce mouvement inoubliable des zygomatiques dégageait le scintillement de diamant de ses dents, prêtes à mordre dans la vie pour en extraire le suc des richesses humaines. La nature, tout autour, laissait courir sur elle le mouvement léger du zéphyr. Sa chevelure semait ainsi quelques mèches sur les doigts du vent...me rappelant un chaperon perdu dans le bois de ma mémoire.

           

C'est là, contre ce rocher mal taillé qui découpe la brume, entre deux rugissements de l'écume, que je l'ai embrassée ; c'est là qu'elle m'a tout donné, le mystère des profondeurs et la brûlure du soleil, l'intensité cardiaque et les fresques pulmonaires, les frissons de la peau et le bouillonnement du sang, la folie merveilleuse et la passion éclair. La douceur du velours de ses lèvres, qui électrisait la peau de ma joue, me donnait l'envie féroce de la mordre, telle une alléchante pâtisserie, de l'envahir comme un palais offert au bélier humain... C'est là que j'ai prié, pour la première fois, pour que l'instant ne finisse jamais... Et je m’estime presque exaucé puisqu'il ne me quitte plus même loin d'elle !

 

On a tous un moment qui meuble une vie. Un moment que l'on donne pour rien, par amour, tout simplement, une main tendue, comme vers un enfant, qui apporte l'impossible : c'est peut-être cela le bonheur. Savoir garder un ange dans son cœur et pouvoir faire face à la grande batiste de ce squelette mariste qui brandit encore sa faux et... déploie, au-dessus de nos têtes, sa cape étouffante qui recouvre les toits de vapeur de carbone, menaçant de réduire la respiration de toute une planète. Pouvoir braver tout cela, à deux, la main dans la main, le nez dans les étoiles, grandis au point de ne plus voir les autres et de les oublier dans un baiser.

Un battement de cils, la contraction d'une paupière et son regard m'inspirait. Elle n'est pourtant plus là mais je la vois transparaître sur le manteau de ma nuit. Je dors beaucoup mieux lorsqu'elle me sourit. Je sens sa petite main se poser sur mon destin l'ouvrant sur un morceau de ciel... Le mirage vampirise mes yeux, les arrose d'une image qui s'use au fil du temps mais jamais ne disparaît.

Depuis qu'elle est repartie vers son univers, j'ai dû pactiser avec la déesse solitude pour qu'elle m'enlace à sa place et me la fasse oublier, tant aucune autre ne put s’y comparer. Mon miroir aurait refusé de la refléter aussi sublime qu'elle ! Je voudrais pouvoir briser mon calvaire pour lui cueillir dans le suaire de l'empyrée des mottes luisantes de pluie mais même l'orage pleure la terre de son chemin.

Aujourd'hui, après que le mange-minutes ait mordu ma vie pour l'amoindrir et la pousser vers le chemin de la Fin, j'ai parfois l'impression de l'avoir imaginée. Et je me dis :

« Marius, et si c'était un rêve que tu as cru vivre ? » Elle et moi, allongés sur la grève. Le soleil ému plongeant dans l'étendue bleue pour me donner un manteau d'éternité obscure ne brillerait plus que dans l'émail où tournent ses pupilles. Tout cela, rêve ou fantasme d'un vieux gamin, n'est plus qu'une image qui me poursuit, après avoir conquis mon stylo et déployé quelque feuille restée blanche de peur d'affronter ce dernier voyage...

 

Quoi ? Pourquoi me regardez-vous de cette manière ? Pourquoi ne l’ai-je pas suivie ? Croiriez-vous que le Nord m’ait à ce point effrayé ?

Même si, pour moi, il commence juste après le château des Papes à Avignon, le grand Nord ne m’aurait pas arrêté ! Dois-je vous dire bêtement que je (ne) crains « dégun » ? C’est plus simple que cela : pour elle, j’aurai supprimé mes claquements de dents, mes frottements de mains et tout le reste… J’aurais survécu en plongeant tout entier au fond de ses yeux et me serais chauffé au doux contact de sa peau, mais…

Et oui, pourquoi faut-il donc toujours sortir ce « mais » de sa poche ; ce mot infâme bassement sournois et justicier qui vient déjà transformer la beauté de l’expression qui le précède, qui brise net une affirmation magique pour l’effeuiller dans la vulgaire salade de la réalité.

Oui, la réalité, c’est ainsi qu’on appelle ce moment fatal où le rêve doré éclate en morceaux. Un gabian qui volait trop bas a heurté sa tête et elle a basculé.

Elle est tombée du rocher en se brisant les cervicales sur les pierres aiguisées par le ressac…

La dernière caresse sentie sur sa joue était celle de la vague juste à la minute où son regard s’est éteint. Et mon ciel est devenu noir en plein jour, éclipse totale, image fuyant devant deux yeux grand-ouverts. Elle n’est partie que de mon monde sans retourner dans les brumes du sien.

Elle est toujours là, elle se déhanche quelque part dans mon trou de mémoire…

 

Oui, elle n’est point partie comme je préfère l’imaginer parfois : elle est restée là-bas dans une petite niche de marbre au bout du cimetière où elle n’entend plus mes vers, se contentant de nourrir les siens, les immondes petits chevaliers servants de l’inertie finale : trop belle pour être ainsi enterrée n’est-ce pas ? Là, sa mort, au contraire, déterre mes images tristes et la plage déserte reste froide même en juillet… Les traces de ses pas se matérialisent dans le souvenir et s’estompent ensuite la soulevant au-dessus du paysage flou. Elle porte une paire d’ailes qui essuie le ciel à l’instar d’un pare-brise au-dessus de son dos pour qu’il retrouve pour moi le bleu pur du midi. Je regarde sa petite main qui tient étrangement mon vieux chapeau… Celui qu’à mon arrivée près d’elle, elle avait utilisé pour couvrir la rose qui fleurissait entre ses jambes, dithyrambe à sa beauté naturelle. Mon chapeau de paille, emporté ce jour-là par un coup de Mistral jusqu’à elle, avait favorisé cette rencontre comme dans un merveilleux poème magistral d’Alice Hugo.

Alors, cette fille ne revient que pour moi, légère, chevauchant un nuage dans sa toge d'ange quand mes mots m'échappent pour voler vers elle. J’ai oublié son prénom depuis et pourquoi ne pas l’appeler Alice puisque grâce à elle j’ai découvert un pays des merveilles ? Celui que je rejoins quelquefois au détour d’un songe ; une évasion, peut-être ou un retour vers la beauté intérieure et elle marche sur moi sans voile ni corps, la fille du Nord. Elle est là, dans une autre vie, au-delà de la mort, elle domine tout : elle écrase mon cerveau de ses pieds nus. Elle vendange. Sa main tient ce poème que j'avais écrit pour elle et qu'elle n'a jamais lu :

« Éphémère ».

 

 

Quelques poutounades ont gagné le grand prix d'honneur de l'Académie de Provence en même temps que le rondel "On se retrouvera sur une étoile"

 

Tout est à l'intérieur du livre: Fabulations du pays d'Aubagne

En vente  sur commande à Provence -poésie  ou à l'auteur

cover fab4

Merci à L'Académie et à Mr Roger Blanc de l'avoir primé en 2011.

Et une opération proposera le livre à 12 euros au lieu de 15 à la rentrée sur les stands Provence-poésie.

 

Histoire d’eau

 

Selon l’histoire d’Aubagne du docteur Jean-Louis Barthélemy une pieuse légende attribue l'origine de l'Huveaune aux larmes de Sainte Marie-Madeleine réfugiée à la Sainte-Baume.

D'où la réalité et la fabulation peuvent se rejoindre, se marier et se confondre autour d'une voie d'eau... Car l'eau, c'est la vie ! Mais rien n'arrête jamais sa colère. Si elle éteint le feu, si elle noie les terres, si elle humidifie l'air, aucun élément ne peut la détruire.

 L'Huveaune prend sa source à 571 mètres d'altitude. Elle regroupe ses affluents : le Merlançon, Le Jarret, le Peyruis, le Fauge et la Vède. Il faut savoir que le lit original de l'Huveaune a été détourné en 1741 à cause du désastre du 21 octobre. Si, de nos jours, lorsqu’on parle de crue et d'inondation, on a de peine à le croire, en regardant le filet d'eau paisible qui traverse Aubagne sous les pattes des canards, il est exact qu'en 1978, beaucoup plus près de nous, l’eau recouvrit la plaine des Paluds jusqu'à St mitre en passant par Lamagnon. De plus, il faut savoir aussi qu’autrefois les plaines des Paluds, Beaudinard, les Aubes et les défensions ne constituaient qu'un grand lac. Ce sont les alluvions transportées qui ont modifié le paysage.

Malgré cela, les années de sécheresse de 1683 à 1895 ont fait souffrir Aubagne d'un manque d'eau. La vallée de l'Huveaune dégage toujours pourtant une poésie exquise ovationnée par Stendhal.

Aussi, ne vous étonnez pas si les propos ou récits qui vont suivre sont fabuleux et véhiculent des personnages pittoresques, cousins de ceux de Daudet ou de Jean-Claude Rey, au moins par leurs histoires. C'est la magie du pays d'Aubagne. Et si je vous disais que l'auteur est un descendant de Jean-Baptiste Camoin, dit Cieron, maire d'Aubagne sous Louis XVI, qui avait demandé au district de lui céder les geôles du château d'Aubagne pour en faire la prison jusqu'en 1903, date où les cellules furent transférées à la gendarmerie du cours Beaumont qui remplaçait la vieille gendarmerie centrale transformée en... café Noailles !

Fabulation ?

 

Ce texte a été écrit en 2003 après la participation de l'auteur aux journées du patrimoine organisées par les amis du vieil Aubagne (voir la revue de cette époque: au fil de l'eau)

C'est par lui que démarre le nouveau livre que Provence-poésie se propose de lancer sur ses stands, nous pensons que les amis et habitués à lire ses ouvrages ont déjà reconnu l'auteur, pour ceux qui seraient intrigués, il leur suffira peut-être de dévisager le brave curé qui échappe à une inondation en robe d'évèque dans un parapluie, ci-dessous, au grand étonnement de Nicole Manday ; une des meilleures histoires contenues dans nos poutounades: le parapluie enchanté. A bientôt...

A propos, qu'est-ce, une poutounade ?

 

 

 


Article: Nicole Manday

© voir le chapitre cinq de j’ai même rencontré le chaperon rouge

¨ voir chapitre six : j'ai même rencontré...

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